Quand le festival Jidar a vu le jour en 2015, le street art commençait à peine à investir l’espace public marocain. L’ambition était de rendre cette discipline accessible, tant pour les artistes que pour le public, tout en offrant des perspectives d’avenir à ses adeptes qui peinaient à trouver leur place dans l’écosystème des galeries et des Beaux-Arts. Pour y parvenir, Jidar s’est donné plusieurs missions : mettre les artistes marocains en contact avec les meilleurs muralistes mondiaux, familiariser les habitants à l’art urbain, créer un espace de formation et favoriser des temps d’échange entre tous ces publics, y compris scolaire et universitaire.

À l’époque baptisé “Jidar – Toiles de rue”, le festival a été lancé par l’EAC-L’Boulvart, qui lui a insufflé son expertise en matière d’ingénierie culturelle. Cette association joue en effet depuis 1999 un rôle de défricheur, de soutien et d’accompagnateur de la jeune scène alternative à travers l’organisation d’événements comme L’Boulevard (festival de musiques actuelles), Le Tremplin (compétition pour révéler les jeunes talents) ou encore au sein du Boultek, premier centre de musiques actuelles au Maroc. L’édition 2015 de Jidar a également bénéficié du partenariat avec la Fondation nationale des musées, donnant lieu à la toute première exposition d’art urbain au Musée Mohammed VI d’art moderne et contemporain, intitulée “Main Street”.

Véritable laboratoire d’art urbain, Jidar a grandi sans jamais dévier de la formule qui lui sert encore de trame aujourd’hui : des performances murales pour rendre l’art accessible dans l’espace public, un mur collectif d’initiation au street art pour susciter des vocations ainsi que des rencontres pour connecter les différents acteurs culturels de la ville et sensibiliser le public. Chaque édition a apporté une pierre supplémentaire à l’édifice, afin de consolider cet écosystème en construction. C’est ainsi que les ateliers de sérigraphie ont intégré la programmation du festival en 2002, afin de promouvoir cette pratique qui offre un revenu durable aux artistes. L’année suivante, les visites guidées menées dans différents quartiers de Rabat sont venues combler la curiosité des habitants pour les fresques qui colorent leur quotidien.

Affiché dès le début, l’objectif d’inscrire Rabat dans le circuit international du street art est désormais une réalité. Plébiscité par les artistes du monde entier, Jidar a progressivement installé une culture du street art qui a fait des émules. Aujourd’hui, les carnets de commande des muralistes marocains sont régulièrement remplis, grâce aux sollicitations des écoles ou autres institutions publiques ou privées qui veulent avoir leur fresque. Une scène urbaine est née et continue de se donner rendez-vous chaque année au printemps pendant les dix jours de Jidar – Rabat Street Art Festival.